Dans le cadre de la mise en oeuvre du prélèvement à la source, le Ministre a adressé un courrier aux employeurs de moins de 20 salariés afin de faire la promotion du TESE, présenté comme la solution gratuite et simple de gérer le PAS.
Selon M. DARMANIN, « Le TESE et le CEA (dans les associations) peuvent simplifier les formalités sociales liées à l’emploi de salariés, en réalisant le calcul des cotisations et leur reversement, ainsi que la production des bulletins de salaire. Ils pourront, dès le 1er janvier 2019, prendre en charge la déclaration et le reversement du prélèvement à la source, de façon simplifiée, et ainsi vous dispenser de toute démarche supplémentaire auprès de l’administration fiscale. »
Mais qu’en est-il en réalité de ce dispositif ?
Les modalités de fonctionnement du TESE :
En préambule, il est important de rappeler que l’employeur qui décide de recourir au TESE doit l’utiliser pour l’ensemble de ses salariés. Il ne peut effectuer un panachage et ne l’utiliser que pour certains salariés seulement.
Une fois cette décision prise, le TESE permet à l’employeur qui y adhère de remplir certaines de ses obligations :
Les obligations subsistant à la charge des employeurs mais passées sous silence par Monsieur le Ministre :
Dans la pratique, l’employeur qui a recours au TESE doit continuer à remplir un certain nombre d’obligations notamment :
Dans les faits, l’employeur souhaitant recourir au TESE doit s’assurer qu’aucune disposition légale et/ou conventionnelle particulière ne s’applique aux relations contractuelles qu’il entretient avec son salarié. Après avoir parcouru le Code du travail et la convention collective applicable à son entreprise, il y a donc de fortes chances qu’il doive en outre rédiger un contrat de travail en bonne et due forme et respectant ces dispositions particulières.
Les risques encourus : le TESE est source d’insécurité juridique pour l’employeur
Dans la mesure où l’employeur n’a pas forcément toutes les compétences et connaissances juridiques nécessaires à la bonne application de la législation et des conventions en matière de droit du travail, le recours au TESE est source d’une grande insécurité juridique. Régulièrement, les tribunaux condamnent les employeurs à indemniser des salariés embauchés avec le TESE en raison d’une mauvaise application du code du travail et/ou de la convention collective.
Voici quelques cas :
Cour de Cassation du 3 mai 2016, n° 14-29317: re-qualification du CDD en CDI du salarié embauché en TESE
L’employeur avait embauché en CDD un salarié pour des contrats d’extra en utilisant le TESE. Ayant tardé à transmettre au centre de traitement le volet d’identification du salarié, dont copie doit lui être remise, le CDD a été re-qualifié en CDI. Outre les honoraires de l’avocat que l’employeur s’est vu contraint de consulter, les conséquences en sont : rupture du contrat assimilée à un licenciement sans motif et ouvrant droit à des dommages et intérêts, versement du préavis et des congés payés sur préavis.
Arrêt en détail : ici
Cour de Cassation du 5 mars 2014, n° 12-17809 : cas de re-qualification d’un contrat à temps partiel en contrat à temps plein
Le TESE établi par l’employeur ne précisait pas la durée du travail le contrat a été re-qualifié en contrat à temps plein. Conséquences : versement d’un rappel de salaire de 13.000 € et des charges correspondantes.
Arrêt en détail : ici
Cour de Cassation du 6 novembre 2013, n° 12-24053 : cas de non respect de la procédure de rupture du contrat.
L’employeur avait embauché en TESE un salarié dont il a rompu le contrat dans l’ignorance de la procédure à respecter. Conséquences : versement de dommages et intérêts pour rupture sans motif réel et sérieux.
Arrêt en détail : ici
En conclusion, le recours au TESE n’exonère pas l’employeur de ses obligations vis-à-vis des salariés et ne le dispense pas d’appliquer les dispositions légales et conventionnelles. En outre, la complexité du droit social et ses évolutions sont sources de contentieux avec les salariés. Il est donc MENSONGER de présenter le TESE comme un outil de simplification de la gestion sociale d’une entreprise. Le message diffusé par M. DARMANIN et ses services induit l’employeur en erreur car il comprend que grâce au TESE il sera déchargé de toute tâche administrative, qui plus est gratuitement !
Sur ce point, qui peut croire raisonnablement que cet outil de calcul incomplet et non sécurisant est un service gratuit offert aux entreprises ? A l’heure où l’état ne semble pas capable de maîtriser la dépense publique, pourquoi confier à un service public - je vous le rappelle financé par la collectivité - une tâche jusqu’alors réalisée par des acteurs du privés, formés pour cela et compétents, sur un marché libre, concurrentiel et créateur d’emplois ?
Enfin, maintenant que vous êtes informé de manière plus complète sur ce qu’implique de recourir à ce dispositif, ne pensez-vous pas que l’employeur, avant tout chef d’entreprise, a mieux à faire que de passer ses soirées à parcourir le Code du travail et sa convention collective ?
Il me semble que chacun doit faire ce pour quoi il est compétent et se concentrer sur son coeur de métier.
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